Fars et satrapes 15 / Rouge sur vert, on s'y perd
La fin de soirée se déroule dans le même restaurant que le midi. Mais comme le patron est seul et qu’il sous-traite notre commande auprès d’un autre resto, on a le temps de discuter safran et intensité de saveur parmi les crocus de Naïn. En bref, il nous raconte tout sur le pistil.
On lui achète quelques boîtes, il nous montre les vidéos dans lesquelles il apparait et insiste sur son safran « organique » (bio en français). Et finalement les plats arrivent et on passe le repas avec lui, les seuls clients annoncés ne devant arriver que vers 23h.
Et puis vient la fin du repas, lorsque le patron sort sa petite pochette spéciale, en précisant que c’est pour nous, qui avons acheté du safran, parlé persan et dîné avec lui (donc pas pour les clients lambda…). On y trouve une blague à tabac avec du tabac organique, des filtres et du papier à cigarettes organique. Il entreprend de mélanger son tabac avec quelques pistils de safran de qualité basique et de nous préparer deux bonnes vieilles « roulées », au safran. Il précise que tout cela est très doux et bien sûr, organique, donc non nocif. L’ensemble est effectivement assez doux et laisse un petit goût de safran sur la langue. On aura poussé l’expérience du safran aussi loin que possible.
On poursuit le lendemain par notre road trip improvisé. Pour autant, on ne manque pas d’objectifs de voyage, Sandrine ayant en stock dans sa tête plusieurs dizaines de sites qu’elle veut visiter en Iran : il y en a donc forcément sur notre route, quelle qu’elle soit.
Au programme de ce retour un peu anticipé sur Téhéran, Ardestan et sa très vieille mosquée à 4 eivans (les eivans, ou iwans en arabe, sont ces cours couvertes au sein desquelles l’ombre permet de supporter la chaleur de l’été en Orient). Puis le village très connu d’Abanyeh.
La mosquée Jomeh d’Ardestan date d’un peu après celle de Naïn mais se distingue par ses eivans, toujours dans un style très sobre, bien que certaines parties aient accueilli postérieurement des mosaïques bleues. Elle en impose au visiteur, surtout qu’elle est vide (un peu comme toutes les mosquées d’Iran, vendredi mis à part…) lorsque nous y passons.
On file ensuite vers le village d’Abanyeh, avec un « changement de milieu ambiant ». Situé dans les monts Zagros, à 2500 m d’altitude, il est entouré de montagnes arides, aux tons variés. Le village lui-même est entièrement recouvert d’un pisé rougi par la terre avoisinante, ce qui lui donne vraiment un cachet spécial. Les habitants arborent aussi des tenues uniques et parlent le pehlevi, soit un ancêtre du persan.
La montagne et le village accueillent aussi les premiers amandiers en fleurs.
Une petite pause thé à Kashan et nous en profitons pour refaire un tour dans le jardin Bagh-e-Fin, toujours aussi agréable.
Mais ce qui nous étonne le plus, en fin de journée, sur la route retour de Téhéran, ce sont les verts qui sont apparus dans le paysage et que nous n’avions encore jamais vus dans cette zone depuis notre arrivée. Les champs de blé ont poussé et même les bords de l’autoroute sont recouverts d’un petit duvet d’herbe qui change totalement l’atmosphère du pays. Ce n’est plus une vaste plaine aride, mais une presque prairie qui nous entoure. Cela adoucit le paysage, pas complètement le régime.
La route se termine facilement, sans le moindre embouteillage jusqu'à la maison, tous les Téhéranais ayant quitté la ville pour aller passer le nouvel an iranien dans leurs familles.
Nowruz mubarak
Joyeux printemps
Et on espère que Léo va coller une déculottée aux Anglais ce soir avec les Bleuets :-)